L’auteur du texte (Thomas Heams, de la Convention pour la VI° République) décrit cette élection comme "celle d’un homme seul et providentiel, investi d’un pouvoir exhorbitant, en dehors de tout principe de responsabilité et de contrôle". C’est vrai, la Constitution de la V° République indique clairement que le président n’est pas responsable devant le Parlement (donc devant les Français), c’est-à-dire qu’il n’a de comptes à rendre à personne de ses actes. C’est le Premier Ministre qui est responsable, qui joue le garde-fou du président.
Thomas Heams poursuit: "Le peuple est convoqué à une formidable bataille d’ego qui prend l’apparence d’une campagne, mais n’est, dans les faits, que l’occasion d’une dramatisation de thèmes racoleurs, d’un florilège de promesses pathétiques ou dangereuses et d’une hystérisation du débat démocratique par une personnalisation caricaturale et infantilisante des enjeux".
Quand je lis ce texte, écrit fin 2006 (c’est-à-dire alors que l’on n’était pas encore certain de s’orienter vers un duel Sarkozy-Royal) je suis troublé de constater à quel point il était prémonitoire. La bataille d’ego (Nico contre Ségo), la dramatisation de thèmes racoleurs (faits divers, toujours plus de faits divers), le florilège de promesses pathétiques (ah, cet inénarrable débat d’entre-deux-tours!), l’hystérisation du débat (notre président monté sur ressorts et piles Duracuire), la personnalisation caricaturale et infantilisante (les "je veux", "je ferai" prononcés à corps et à cri dans les discours, la médiatisation people à l’américaine, Sarkozy qui veut devenir président parce que c’est son rêve de gosse)… Put… ce type est divin ou quoi? Voici ce qu’il dit ensuite:
"Cette élection directe, soi-disant au-dessus des partis, mais dans les faits bien encadrés par eux, est aussi en filigrane une critique permanente de la démocratie participative. Dans l’illusion d’un rapport immédiat entre un chef et son peuple, il y a toujours l’expression discrète d’une défiance face à cet intermédiaire qu’est le Parlement". Or, rappelez-vous ce qui est dit plus haut, le président, malgré ses nombreux pouvoirs, n’est pas responsable devant ce même Parlement… Oui, cette élection présidentielle est moins démocratique qu’il n’y paraît.
La suite demain.